3-47-37. H. Poincaré to Gaston Doumergue
Paris, le 12 janvier 1910
République Française — Bureau des Longitudes
Direction de l’Enseignement Supérieur – 2e Bureau
Le Président du Bureau des Longitudes à Monsieur le Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts et des Cultes.
Suivant les indications de votre dépêche du 24 décembre 1909 (Direction de l’enseignement supérieur – 2e Bureau) j’ai l’honneur de vous retourner la lettre du 13 décembre dernier, par laquelle la Fédération des Syndicats de Capitaines au Long-Cours de France demande que M. l’Inspecteur général d’hydrographie du Ministère du Commerce soit appelé à représenter au Bureau des Longitudes les intérêts de la navigation commerciale ; vous voulez bien, en outre, demander l’avis du Bureau sur la suite que cette requête est susceptible de comporter.
Voici cet avis :
Cette demande s’appuie sur ce que la navigation commerciale doit être avant tout rapide et économique, et exige des recueils et des tables faciles à consulter et présentant sous un petit volume le maximum des renseignements utiles au navigateur.
En ce qui concerne les tables astronomiques utiles à la navigation, le Bureau des Longitudes a déjà donné satisfaction à ce besoin en créant l’Extrait de la Connaissance des Temps qui sous un petit volume et pour un prix modique contient tous les éléments nécessaires aux marins. Ce recueil est d’ailleurs utilisé par les petits bâtiments de la marine militaire.
Les méthodes de navigation, et surtout les éléments astronomiques dont elles exigent l’emploi sont d’ailleurs identiques, qu’il s’agisse de navires militaires ou de bâtiments de commerce ; les un et les autres ont également besoin de naviguer avec rapidité et économie.
Les intérêts de la navigation sont déjà représentés au Bureau des Longitudes par deux officiers de marine, membres titulaires, et par le Directeur d’Hydrographie, membre en service extraordinaire ; cela peut paraître suffisant.
En dehors des tables astronomiques, tous les documents nautiques sont publiés par un seul établissement, le service hydrographique de la Marine ; les mêmes cartes, les mêmes instructions, les mêmes annuaires de marées sont utilisés par les marines de guerre et de commerce. À plus forte raison les mêmes tables astronomiques conviennent à l’une et à l’autre ; et s’il y avait quelque perfectionnement à y introduire, qui intéressât les navires de commerce ; il ne serait pas moins utile à la marine militaire.
Il convient de relever un passage de la lettre de la Fédération où il est dit que M. Massenet peut être à juste titre considéré comme le chef du service hydrographique de la marine marchande. Ainsi qu’il est dit plus haut, il n’y a, en France, comme dans les autres pays, qu’un seul Service hydrographique, celui de la Marine, qui pourvoit aux besoins de tous les navigateurs. L’Inspecteur général d’hydrographie est la tête des Écoles dites improprement d’hydrographie, où l’instruction scientifique est donnée aux aspirants capitaines au Long-Cours, instruction assez élémentaire d’ailleurs ; mais ses fonctions n’ont aucun rapport avec celles du chef du Service hydrographique.
Enfin, si les Capitaines au Long-Cours ont quelques modifications à demander aux tables astronomiques destinées aux marins, ils sont assurés, en adressant leurs propositions au Bureau des Longitudes d’y trouver toutes les compétences nécessaires pour les examiner avec l’intérêt qu’elles méritent et leur donner satisfaction dans la mesure du possible.
Poincaré
LS 3p. F17 13571, Archives nationales françaises.
Time-stamp: "23.01.2016 22:57"