5-2-3. H. Poincaré to Eugénie Launois

[Février 1877]

Rien de bien neuf ; mercredi whist traditionnel ; alternances de beau temps et de mauvais temps où le mauvais temps domine de beaucoup.

Le whist à quatre
Autour du tapis vert on voyait mercredi
Quatre joueurs de whist ; on s’était réuni
Chez Madame Olleris, ainsi qu’à l’ordinaire
L’un d’eux, vous savez qui, véritable cratère
Passe en quelques instants de la joie au chagrin
Du carreau, quel malheur ; Perdu, j’en suis certain ;
Vous jouez, je le vois, d’une façon soignée.
Chez lui tous les secrets de cet art délicat
Sont plutôt un instinct, non pas une science ;
Aussi regrettait-on parfois qu’il oubliât.
Qu’en anglais le mot whist voulait dire silence ( ?)
Mais en face de lui, l’abbé son partenaire
Ne vous dit pas un mot ; lui ; Non ! bien au contraire
Quitte après la partie à peser savamment,
S’il fallait jouer coeur ou bien le roi de pique
Avec le même ton froid et pédagogique
Qu’il prend quand il commente un divin sacrement.
Profondément savant sur les secrets du jeu,
Du whist, de l’écarté, véritable prophète
Dans la discussion Jules Rinck lui tient tête
Mais de la théorie il s’inquiète peu
Non pas qu’il pense bien à fond la connaître ;
Dans l’art de tous les jeux il a su passer maître
Mais non pour l’art lui-même ; un attrait différent
À la table de jeu l’attire en ce moment.
Il regrette pourtant qu’une règle inflexible
Qui dans un cercle étroit renferme les enjeux
Rende pour le moment à peu près impossible
De faire à la partie un gain plus sérieux.
Aussi préfère-t-il au whist jeu des habiles
Le simple lansquenet, la plaine de Longchamps
Où les pertes d’argent sont beaucoup plus faciles.
Le quatrième enfin, pourquoi si jeune encore,

AL 2p. Collection particulière, Paris. C083.

Last edit: 28.09.2014